L'HISTOIRE DE L'AUSTRALIEN
Origine du Berger australien
Comme une grande majorité de race, l'origine du Berger Australien est plus que mystérieuse. Les amateurs, passionnés, éleveurs affirment chacun leurs propres théories et hypothèses sur le développement de la race. Parmi elles, aucune n'a vraisemblablement été considérée comme étant plus véridique que les autres, ceci par manque de preuve. En revanche, toutes ont pour point commun le voyage de l'Australie à l'Amérique du Nord.
La théorie des Basques
Pour bien situer et comprendre le contexte, au XIXe siècle, il y eut plusieurs "ruées vers l'or" dont une en Australie et une en Amérique du Nord. Lorsqu'une personne trouvait une pépite dans une région, on pouvait s'attendre dans les mois qui suivaient de voir des centaines même des milliers d'autres personnes, de toutes cultures, faire le voyage pour tenter leur chance elles aussi. Ainsi en l'espace de dix ans, la population Australienne est passée de 400 000 habitants à 1.2 millions d'habitants avec parmi eux une grande majorité de Britanniques.(1) Naturellement, autant de monde en si peu de temps n'est pas sans conséquence. Entre autres, il y eut une forte demande en laine de mouton. C'est pourquoi l'Australie fit importer des moutons de la race Mérinos(originaire d'Espagne) connue pour avoir une fourrure beaucoup plus épaisse et ainsi fournir bien plus de laines que les autres moutons.
Troupeau de mérinos accompagné d'un chien de berger, en Australie. Photo State Library of Victoria Collections
En se basant sur ces faits, certains cynophiles supposent que les Bergers Australiens seraient les descendants des chiens qui ont été importés en Australie par l'intermédiaire des Basques et leurs moutons Mérinos. Les Basques désignent principalement la population se situant au Sud-Ouest à la frontière France / Espagne, mais on les trouve aussi en Amérique et au Mexique. Selon eux, les Basques auraient emporté avec eux les chiens qu'ils utilisaient pour conduire les troupeaux de moutons, et ces chiens seraient alors devenu l'ancêtre du Berger Australien. Mais la population Basque ayant une langue qui lui est propre, il est difficile de définir avec certitude que le berger australien descendait bien de leur chien. D'autant plus que d'autres faits viennent contredire ces propos, le mouton Mérinos aurait été principalement importé de Saxe (Allemagne) par facilité et non pas de l'Espagne.(2)
D'un autre côté, de nombreux hommes basques ont immigré en Australie en tant qu'individus, comme la grande majorité, pour profiter des opportunités qu'offrait la découverte de l'or. Ils ne se sont donc pas déplacés avec leurs cargaisons de moutons et de chiens comme on pourrait le croire. Ce n'est qu'une fois sur place qu'ils ont compris les avantages liés à l'élevage de mouton. Ils ont obtenu un chien local et ils se sont reconvertis(3) dans l'élevage de mouton, un secteur devenu très important et profitable.(4) Bien sûr, cela n'exclut pas que certains d'entre eux ont probablement emmené leur chien et qu'ils les ont faits croiser pour obtenir un chien de berger plus adapté aux conditions de vie du pays. Mais ce chien devient alors un élément de ce qui sera plus tard le berger australien et non pas son ancêtre à proprement parler, ni même sa principale source.
L'histoire du Berger Australien
Lorsque l'Espagne a colonisé l'Amérique, ils y ont introduit avec eux deux types de mouton : le Churras (pour la viande et les fibres) et le Mérinos (pour la finesse de sa laine). L'importation des moutons fut un immense succès puisque ces derniers ont réussi à s'adapter et prospérer sur leur nouveau territoire. Ces troupeaux de moutons étaient accompagnés de chiens de types berger, notamment le Carea Leonés reconnu pour être un chien très agile, rapide, intelligent et robuste. Cette race originaire d'Espagne était principalement utilisée pour surveiller, protéger et conduire les troupeaux pendant les périodes de migration des plaines à la montagne et vice-versa (transhumance) depuis le Moyen Age. Elle était particulièrement appréciée des bergers parce qu'elle avait la faculté de pouvoir diriger et contenir un troupeau dans une zone délimitée. Ce style de travail est bien plus difficile que lorsqu'il s'agit de conduire les moutons en zone libre. On le décrit comme ayant une hauteur moyenne entre 48cm et 55cm, avec une robe de couleur variante noire, foie ou encore rouge merle, avec ou sans marque blanche et de longueur modérée.
Le Carea Leonés est l'un des premiers chien à conduire et diriger les troupeaux Mérinos. Photo Diotime
En 1840, au moment de la ruée vers l'or en Californie l'histoire raconte que le nombre de moutons présents dans le Far West(Amérique de l'Ouest) avait beaucoup diminué. Conséquence, là aussi d'un grand nombre de chercheurs d'or venu s'installer dans le pays, et de la guerre de Succession (1861). Pour répondre à ce manque, des troupeaux ont été importés du middwest des Etats-Unis ainsi que de la Horn (île du Golfe du Mexique) et de l'Australie.(6) Ce sont les chiens qui ont accompagné ces troupeaux qui ont apporté chacun à leur tour une souche permettant la création et le développement du Berger Australien.
Parmis les troupeaux de moutons en provenance du Middwest, on trouvait généralement un chien ressemblant à l'ancien colley qui fut par la suite surnommé "bobtailed collie" ou encore "berger anglais" parce qu'il s'agissait d'une race développée par les britanniques et implanté en Amérique (ainsi qu'en Australie) lors de la colonisation. C'était un chien généralement de couleur noire avec des marques blanches et/ou beige ou encore bleu merle, mais rarement de couleur sable comme on peut en voir aujourd'hui. À noter qu'à l'époque, le Colley ne ressemblait pas à la race que nous connaissons aujourd'hui, le poil était plus court et plus rêche. La couleur bleue merle était très répandu à ce moment-là, et il était donc fréquent de voir des chiens bleus comme compagnon et travailleur dans les fermes.(7) Les chiens qui accompagnaient les cargaisons de mouton issues du Golfe du Mexique étaient majoritairement d'origine espagnole. C'était des grands chiens, puissants à la robe jaunâtre tachetée de noir et feu. Il est probable que parmi eux se trouvait également le Carea Leonés. Enfin, les chiens de berger fournis avec les moutons importé d'Australie étaient pour la plupart d'origine britannique, comme les colons en Australie. En revanche, il est possible que sur le territoire Australien ces chiens aient croisé d'autres races notamment les Heelers Gallois qui sont les descendants de l'alliance entre les Koolies Allemand et des chiens britanniques. Ainsi que des chiens de l'ancien type Colley et une race encore mystérieuse le Smithfield décrit comme étant un chien à poil long.
une femme avec un type Colley sur la plage. Photo marilyn_cvitanic
On suppose que tout comme pour les chiens de l'ancien type Colley qui prirent le nom de Berger Anglais, les Américains voyant débarquer les chiens à la couleur merle des cargaisons australienne aient nommé ces chiens du nom de leur provenance, les "bergers australiens". Par la suite, on a associé la robe bleue merle au berger australien et tous les chiens au poil longs de couleur bleu merle devenait par abus de langage des "bergers australien". Même encore aujourd'hui, on remarque une trop grande confusion à ce niveau-là.
Le développement du Berger Australien
Les Américains ont très vite apprécié les facultés du berger Australien et l'ont adapté à son nouvel environnement. Il ne se souciait pas de savoir si le chien était esthétique ou non. Le principal critère était alors la performance au travail. Mais l'arrivée de la Première et de la Seconde Guerre mondiale sont un désastre, surtout vis à vis de la main d'oeuvre. À partir de 1950, l'association Western Range négocie un accord avec le gouvernement espagnol afin d'autoriser le recrutement d'un grand nombre de berger basque pour combler la pénurie de berger. Ces derniers, à la recherche d'un emploi, sont venus par millier s'installer en Amérique du Nord, notamment dans le secteur de l'Idaho où était condensée la majorité de l'industrie de laine. Ils sont arrivés accompagnés de leur chien avec un visa de trois ans sous contrat avec l'association Cordillère Occidentale et ont été aussitôt recrutés pour gérer les ranches de mouton dans l'Ouest de l'Amérique.(8)
Parmis eux certains sont arrivés avec leur chien, les premiers berger de Pyrénées à face lisse. Selon Bernard Sénac-Lagrange, vice-président des Français Kennel Club la variété à face lisse de Berger des Pyrénées a été principalement trouvé aux pieds des collines pyrénéennes où il a été "très apprécié par des marchands de chevaux et de bétail bouviers." À cette époque, le berger des Pyrénées pouvait également avoir une robe de couleur merle, ce qui provoquer une plus grande confusion entre tous les chiens de couleurs merle présent sur le continent américain. Plus tard, pour une raison quelconque le standard de la race ( des Pyrénées ) a refusé la présence de couleur merle, ce qui provoque la disparition de cette variété (merle).
Berger Australien âgé d'environ 8 mois. Photo inthreedimensions
C'est dans cette période que l'on commence à voir de plus en plus de chiens bleus en Amérique et que l'élevage et la stabilisation de la race commence. Ainsi, c'est en partie grâce à ces Basques que l'on doit l'évolution du berger australien. Là ou il y a une grande confusion dans l'histoire du Berger Australien, c'est que beaucoup de personnes se sont imaginées que parce que se sont les Basques qui sont intervenus dans la création de la race, alors le chien basque est l'ancêtre du berger australien. Il s'agit là d'une immense erreur. Il est probable que leur chien ait contribué à un moment ou à un autre à la race, mais cela ne fait pas de lui la source principale.
En somme, le berger australien est ni plus ni moins l'association de plusieurs types de chien de berger : le Carea Leonés, l'ancien Colley, le Koolie Allemand, le Smithfield, les Heelers Gallois et l'ancien Berger des Pyrénées. Il semblerait également qu'il y ai eu un moment donné une intrusion du Tigre - ancienne race du berger allemand de couleur merle mais aucune preuve concrète n'a pu être apporté si ce n'est que la race aurait participé à l'un des nombreux voyages des moutons en compagnie de Elizabeth Macarthur considérée comme à la reine du succès de la laine Mérinos.
L'influence de Jay Sisler
Jay Sisler, originaire de l'Idaho, est considéré comme étant l'homme qui a permis à la race d'être connu dans tous les Etats-Unis et provoquant par la même occasion un effet de mode pour le Berger Australien. À l'âge de 16 ans il quitte l'école pour aider son père à la ferme. Plus tard, Jay s'inscrit à un concours de rodeo le "Pony Express", mais tombe et se brise la cheville. C'est ainsi que sa carrière avec les Berger Australien débuta. En attendant d'être guéris, il prit la décision de s'amuser à faire faire des exercices aux chiens sans penser que c'était là le début de toute sa vie. Il a donc adopté deux chiots Stub et Shorty pour commencer à leur apprendre des petits tours comme la bascule, la rotation, la danse ou encore la corde à sauter.
Il était patient et savait y faire avec les chiens. Trois exercices de dix à quinze minutes par jours sans jamais forcer le chien et toujours en le récompensant de mots doux, d'une caresse et / ou d'une friandise. Il n'a jamais cherché à les bousculer, il savait que la clé du succès était la persévérance qui petit à petit a permis l'apprentissage de nombreux tours incroyablement bluffant à ses chiens. D'ailleurs, le premier exercice qu'il leur avait appris était de s'asseoir et de se concentrer sur lui, ses gestes ou ses paroles. Il avait instauré une grande cohésion entre lui et ses chiens, une relation de confiance mutuelle et harmonieuse.
Jay Sisler et ses deux bergers australiens
Par la suite, on lui donnera le titre d'éleveur parce qu'il a fait reproduire ses chiens et dont les descendants ont participé activement à l'élaboration de plusieurs lignées de berger australien. Mais il n'était pas réellement éleveur, il a fait reproduire parce qu'il désirait une descendance, son objectif restait avant tout les spectacles avec ses chiens. Spectacle qui seront un immense succès dans tout le continent, allant même jusqu'à faire des films pour le studio Disney. À noter que Jay Sisler n'a pas hésité non plus à prendre des bergers australiens issus des fourrières pour les éduquer et les emmener avec lui dans ses shows.
Nous ne détaillerons pas ici les différentes lignées du berger australien, mais ce qu'il faut en retenir, c'est que les chiens de Jay Sisler sont à les ancêtres de nombreux élevages y compris en France.
Le Berger Australien et l'effet de mode
En France, les premiers Berger Australien sont apparus en 1988 par l'intermédiaire de M. Tamba qui va importer des USA une femelle gestante. Par la suite, plusieurs éleveurs se lanceront dans l'aventure sans même attendre que la race soit officiellement reconnue. En 1996 suite à l'acharnement de nombreux éleveurs, amateurs et passionné la race sera reconnue provisoirement sous le nom d'Australian Shepherd avant de prendre définitivement le nom de berger australien en 2003. Néanmoins, sa reconnaissance définitive n'aura lieu qu'en 2007 !
Evolution du nombre de naissance du berger australien entre 1996 et 2012
En 1997 sera créer le "Club Français pour l'Amélioration des chiens de race berger australien". Un titre plutôt explicite quant à leur objectif vis-à-vis de la race. Une amélioration de taille puisqu'en l'espace de 15 ans le Berger Australien va détrôner le classement de plusieurs chiens pour atterrir en troisième position des chiens préférés des Français en 2012, après le berger belge et le berger allemand.
Aujourd'hui, le berger australien est très à la mode en France. Attention donc aux choix des éleveurs pour la préservation du standard de la race, mais également et surtout de son patrimoine génétique.
Source : https://www.toutsurleschiens.com/dossiers/Race/berger_australien.php
Source:
1- L'Éveil des nationalités - Reader's Digest - 2007
2- Sheep and Wool Science - Ensminger - 1970
3- Si certains d'entre eux étaient déjà des bergers dans leur patrie d'origine, ce n'était pas le cas pour tous.
4- Sweet Promised Land - Robert Laxalt - 1989
5- Chien pratique - David Taylor - 2006
6- Californie - John W. Caughey - 1970
7- The Popular Collie - Margaret Osborne
8- Suivi de l'envahisseur à ses origines: l'histoire de Crupina vulgaire cas d'invasion - Roche - 2003